Des artistes en impesanteur est une résidence unique au monde imaginée par l'Observatoire de l'Espace, la fabrique culturelle du CNES (l'agence spatiale française). Depuis 2006, cette résidence offre l'opportunité à des artistes (Kitsou Dubois, Pierre Meunier, Vincent Ravalec, etc.) de se confronter à l'Espace en embarquant à bord de l'Airbus A300 Zéro-G et de nourrir leur création de cette expérimentation. Cet avion, spécialement aménagé et dédié aux expériences scientifiques, effectue lors de chaque vol une série de 30 paraboles, recréant ainsi, à chacune d'entre elles, 22 secondes de microgravité artificielle.
Les vols paraboliques sont un moyen d'accès essentiel à la micropesanteur. Initialement utilisés pour l'entraînement des astronautes, les vols paraboliques sont aujourd'hui consacrés à des expériences scientifiques et à des essais technologiques d'équipements spatiaux. La société NOVESPACE assure la gestion et la commercialisation des campagnes de vols paraboliques.
L'Observatoire de l'Espace du CNES et le Programme Création et imaginaire spatial
L'Observatoire de l'Espace est créé en 2000 avec l'ambition de replacer l'Espace au centre de préoccupations patrimoniales, historiques et artistiques. Il a pour mission d'élaborer une politique culturelle inédite à la croisée de plusieurs aspirations de politiques publiques. Dans cette perspective, Gérard Azoulay, curator de cette fabrique culturelle du CNES construit et met en œuvre des programmes afin de favoriser l'irruption de la création, de l'art et du patrimoine au sein d'un univers à dominante scientifique et technique.
Le programme Création et imaginaire spatial de l'Observatoire de l'Espace, et dans lequel s'inscrit la résidence «Des artistes en impesanteur», jette des passerelles entre les disciplines scientifiques du monde spatial et la création artistique. La fabrique culturelle du CNES accompagne, ponctuellement ou sur la durée, des artistes d'horizons différents en leur permettant un accès privilégié à l'univers spatial sous des formes les plus diverses (archives sonores, photos, instruments, visites de laboratoires, rencontres avec des acteurs du monde spatial, etc.). Au contact de ce matériau, chaque artiste construit et présente, à l'occasion de rendez-vous comme SIDERATION – le festival des imaginaires spatiaux, du 22 au 24 mars 2013 –, une œuvre aussi originale qu'étonnante. Une œuvre qui vient enrichir l'imaginaire collectif de notre société.
Space Out Space – Calenture n°113 de l'Hypogée
Cette Calenture est une tentative de poésie exploratoire de la microgravité, de la notion d'horizon et des mémoires qui y sont associées.
Pour restituer les sensations physiques, psychiques et poétiques d'une expérience de microgravité, Jean Lambert-wild, habillé d'un pyjama rayé, embarquera à bord d'un vol parabolique. En guise de masque, il portera sur la tête un cube noir qui le privera du sens de la vue et limitera ses facultés auditives.
Au cours des différentes paraboles, ses réflexions et émotions (ou seront consignées par un dispositif d'enregistrement intégré au) enregistrées par un dispositif intégré au cube. Chacune des paraboles aériennes sera, après le vol, restituée dans un texte poétique ou chaque état d'impesanteur sera décrit comme une collision de mémoire et un dépassement de l'horizon sensible.
La préparation et l'exécution de cette Calenture seront filmées par le cinéaste François Royet. Le film sera le témoin sensible, scénique et documentaire, de cette expérience poétique.
L'Airbus A300 Zéro-G permet à ses passagers de faire l'expérience de situations de micropesanteur. Une trentaine de fois par vol, l'avion se cabre et entame une ascension à 45 degrés, puis le fuselage pique en direction du sol. Entre ces deux phases s'allongent une vingtaine de précieuses secondes de microgravité... Ces vols sont l'occasion d'expérimentations scientifiques et, très exceptionnellement artistiques, et c'est à cet égard que Jean Lambert-wild peut, grâce au programme de résidence de l'Observatoire de l'Espace, la fabrique culturelle du CNES (l'agence spatiale française), participer à la prochaine campagne de vols paraboliques. Cela pour mener à bien une Calenture aux facettes multiples, composée entre autres d'un journal de bord, d'images et écrits documentaires, de fulgurances et épiphanies poétiques qui lui seront venues lors des phases dites d'injection et de ressources.
Accompagné tour à tour du réalisateur François Royet et du photographe Tristan Jeanne-Valès, il embarquera vêtu de son pyjama de clown et la tête solidement enfoncée dans un cube anthracite. Les sens entravés, l'ouïe et la vue, surtout, profondément altérées, il devra réaliser, une fois en impesanteur, une série de mouvements chorégraphiques composés et mémorisés au sol. Il faudra essayer, échouer, apprendre de, et avec, ce corps sans autre appuis que lui-même.
L'exceptionnalité de l'expérience suppose une puissante solitude, étayée par cette décision de se coiffer d'un cube opaque. Douloureuse ou euphorique, elle permettra une familiarité avec l'inconnu qui s'étend tant au dehors qu'au dedans de soi: les constellations du vivant et de la mémoire ; les horizons physiques, psychiques et poétiques que représente à soi-même le corps d'un humain. En se couvrant les yeux et les oreilles, Jean Lambert-wild verra et entendra avec la pulpe de ses doigts, avec les muscles de ses jambes qui flotteront en soleil autour de son cube. Tout comme il le fait continuellement dans son théâtre, il nous rappellera, avec cette émouvante entreprise qu'il vit comme une responsabilité, qu'une expérience du monde est poétique et sensible.